L'astreinte
L'astreinte
L’astreinte peut être définie comme une sanction pécuniaire destinée à forcer le débiteur d'une obligation à s'exécuter 3. Cette sanction est prononcée par un juge et est indépendante de la réparation de l'inexécution de l'obligation en cause 4. Cela signifie que le débiteur défaillant peut être obligé de payer le montant de l'astreinte, en plus des éventuels dommages et intérêts auxquels il serait condamné 5.
Mesure de coercition prononcée par le juge, l’astreinte ne peut toutefois pas être confondue avec la clause pénale 6. En effet, cette dernière, a une origine conventionnelle et présente un caractère indemnitaire 7, contrairement à l’astreinte 8. Elle couvre, en outre, un champ d’application plus large que celui de l’astreinte 9.
La prononciation d'une astreinte doit répondre à plusieurs conditions. Tout d'abord, l'astreinte doit nécessairement être l'accessoire d'une condamnation principale, ce qui implique qu’elle doit être prononcée et postulée en même temps que celle-ci10. Ensuite, cette astreinte doit être demandée par le créancier qui peut proposer un montant au juge. Cependant, le juge n'est pas lié par la proposition et peut prononcer une astreinte plus faible ou plus importante 11. En outre, l'astreinte ne peut jamais être exécutée avant la signification de la décision qui l'a prononcée 12. A cet égard, précisons que le juge peut accorder à la partie condamnée un délai, appelé « délai de rémission », pendant lequel l’astreinte ne peut être encourue, et ce, afin de permettre au condamné de se conformer à la décision rendue 13.
Une fois l’astreinte encourue, le créancier n'a besoin d'aucun titre nouveau 14. En effet, il peut se contenter de la condamnation principale pour obtenir le paiement de l'astreinte.
Le montant de l'astreinte peut être fixe ou varier en fonction du nombre de contraventions du débiteur ou du nombre de jours de retard dans l'exécution de l'obligation litigieuse. Quoi qu'il en soit, le juge peut fixer un plafond au-delà duquel le montant ne peut plus évoluer 15.
Par ailleurs, les astreintes peuvent être classées en deux catégories : celles qui sont définitives et celles qui sont provisoires. Dans le premier cas, le juge fixe une astreinte sur laquelle il ne pourra revenir. Par contre, lorsque l'astreinte est provisoire, le juge pourra, à la demande du débiteur ou même du créancier, modifier le taux initialement prévu. Ainsi, le débiteur de l'obligation inexécutée pourrait demander que le juge supprime, suspende ou réduise l'astreinte prononcée en cas d’impossibilité d’exécuter la condamnation principale 16. Pour prendre sa décision, le juge prendra notamment en compte la situation du débiteur, son attitude et les circonstances de l'espèce particulièrement lorsqu'elles sont nouvelles 17.
Enfin, précisons que l’astreinte se prescrit par l’expiration d’un délai de six mois, à partir de la date à laquelle elle est encourue 18. D’après les travaux préparatoires, « il serait en effet contraire au but de l’astreinte et à l’équité de permettre au créancier de laisser s’accumuler par son inaction, les astreintes jusqu’au jour où elles auraient atteint un total démesuré » 19.
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1. Loi du 31 janvier 1980 portant approbation de la Convention Benelux portant loi uniforme relative à l'astreinte, et de l'Annexe (loi uniforme relative à l'astreinte), signés à La Haye le 26 novembre 1973, M.B., 20 février 1980, p. 2181.
2. M. Vandermersch, « Incidence sur l'astreinte de la réformation en appel de la décision entreprise », R.G.D.C., 1995, p. 235.
3. Voy. à ce sujet, O. Mignolet, « L'astreinte – Chronique de jurisprudence (2007-2011) », J.T., 2012/42, n° 6502, pp. 853-862.
4. De Leval, G., « Observations sur l'astreinte », J.L., 1980, p. 242.
5. P. Van Ommeslaghe, Droit des obligations : Tome III, Bruxelles, Bruylant, 2010, p. 2100.
6. Liège (7e ch.), 6 mars 2008, Rev. not. b., 2011, p. 57.
7. J. van Compernolle, L'astreinte, Bruxelles, Larcier, 2007, pp. 39-41.
8. Bruxelles, 30 janvier 2007, Ann. prat. com. & conc., 2007, p. 727.
9. O. Mignolet, « L'astreinte – Chronique de jurisprudence (2007-2011) », J.T., 2012/42, n° 6502, pp. 853-854.
10. B. Compagnion et A. Saudoyez, « L’astreinte et le droit de la famille », Div. Act., 2005, liv. 6, p. 69.
11. Cass., 21 septembre 1993, Pas., 1993, I, p. 717.
12. M. L. Storme, « L'astreinte en droit belge: six ans d'application », in Rapports belges au XIIe Congrès de l'Académie internationale de droit comparé, Vol. 1, Sydney, 1986, p. 209 ; Contra, Liège, 17 novembre 2003, J.L.M.B., 2005, p. 408.
13. Article 1385bis, alinéa 4 du Code judiciaire ; O. Mignolet, « L'astreinte – Chronique de jurisprudence (2007-2011) », J.T., 2012/42, n° 6502, pp. 853-854 ; J. van Compernolle, L'astreinte, Bruxelles, Larcier, 2007, p. 56.
14. Article 1385quater du Code judiciaire ; Cass., 2 septembre 2010, Pas., 2010, p. 2178 ; Cass., 9 février2007, Pas., 2007, p. 287.
15. Article 1385ter du Code judiciaire ; Mons (16ech.), 9 septembre 2010, I.C.I.P., 2010, p. 411. Voy. également les décisions citées et les précisions apportées, à cet égard, par M. Bunkens, « Overzicht van rechtspraak (2003-2011) - De dwangsom in het familierecht », T. Fam., 2012, p. 8.
16. Article 1385quinquies du Code judiciaire.
17. P. Van Ommeslaghe, Droit des obligations : Tome III, Bruxelles, Bruylant, 2010, p. 2094.
18. Article 1385octies du Code judiciaire.
19. Doc. parl., session 1977-1978, no 353/1 du 30 mars 1978, Pasin., 1980, pp. 78 et 79.