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NOTAIRE

Bon a savoir

13 Avril 2016

Le pacte commissoire exprès contenu dans l'acte notarié

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le mois dernier.

Présentation des faits 1   

Monsieur R a, par un acte notarié passé le 8 décembre 2006, vendu à Madame et Monsieur P-J, la nue-propriété d'un appartement, pour y réunir l'usufruit au décès du vendeur.

Le prix de vente a été fixé à 46.500 euros, dont 10.000 euros payables immédiatement et le solde restant dû converti en une rente mensuelle et viagère indexée de 400 euros payable le cinq de chaque mois.

Monsieur R a adressé plusieurs courriers aux époux par lesquels il sollicitait qu'ils lui versent le montant des rentes impayées.

Le 29 décembre 2010, le notaire X, a adressé un courrier aux époux, les invitant à régulariser la situation en payant les arriérés de rentes.

Le 9 février 2011, par l'intermédiaire d'un huissier de justice, Monsieur R a mis en demeure les époux de payer les arriérés de rentes, à défaut de quoi il demandera en justice la résiliation de la vente.

Le 27 avril 2011, Monsieur R a perçu, en partie, certaines rentes.

Le 28 avril 2011, Monsieur R a cité les époux en justice afin de constater la résolution de la vente opérée de plein droit en vertu du pacte commissoire exprès contenu dans l'acte notarié du 8 décembre 2006.

Monsieur R demandait que l'immeuble litigieux redevienne sa pleine propriété et les arrérages ainsi que toutes autres sommes versées par les cités lui restant acquis de plein droit à titre de dommages et intérêts forfaitaires. En outre, il sollicitait leur condamnation à lui payer les arriérés impayés.

Les époux ont formé une demande reconventionnelle ayant pour objet, dans l'hypothèse où le tribunal décide de retenir la résolution du contrat de vente, d'ordonner à Monsieur R de restituer, à titre d'indu, les rentes versées ultérieurement à la date de la mise en demeure, ainsi que le prix de la vente de 10.000 euros et les rentes déjà payées jusqu'au jugement évaluées provisionnellement à 24.800 euros, outre les intérêts judiciaires sur ces montants à dater du jugement à intervenir.

Le premier juge a reçu la demande de Monsieur R mais l'a déclarée non fondée, au motif que le pacte commissoire exprès contenu dans l'acte authentique de vente n'est pas applicable en l'espèce.

Monsieur R poursuit la réformation de cette décision, alléguant que le pacte commissoire exprès est bien valable et devait être appliqué en l'espèce.

 

Décision de la Cour d'appel de Mons

La Cour constate que dans l'acte notarié, le pacte commissoire exprès est libellé en ces termes :  

« Par dérogation aux articles 1978 et 1194 du Code Civil, les parties conviennent expressément, qu'à défaut de paiement par les débirentiers, pour un motif quelconque, d'un seul terme mensuel d'arrérages dans les trente jours de son échéance et trente jours après mise en demeure par exploit d'huissier demeurée infructueuse et faisant état de la volonté du crédirentier de se prévaloir de la présente clause résolutoire, la vente sera résolue de plein droit, sans que des délais puissent être accordés judiciairement aux débirentiers.

Dans ce cas, l'immeuble présentement vendu redeviendra la pleine propriété de la partie venderesse.

Les arrérages et toutes autres sommes versées par la partie acquéreuse à la partie venderesse, de même que tous embellissements apportés à l'immeuble vendu, resteront acquis de plein droit à cette dernière à titre de dommages et intérêts forfaitaires.

En outre, le crédirentier pourra réclamer aux débirentiers tous les frais qu'il aura exposés en vue de la résolution de la vente ainsi que les frais de commandement de payer.

Toute somme échue et non payée portera de plein droit intérêt légal à partir du moment où elle devient exigible et sans pour autant que le crédirentier ne doive mettre en demeure les débirentiers sans préjudice à ce qui est stipulé au présent acte (...) ».

En l'espèce, la résolution du contrat de vente a eu lieu de plein droit à la date du 9 mars 2011, dans la mesure où les conditions posées pour l'application du pacte commissoire exprès ont été respectées. 2

Malgré le fait que la rente impayée au terme convenu a été finalement régularisée, le contrat de vente a toutefois été résolu de plein droit.

La Cour rappelle qu'elle est sans pouvoir pour faire revivre une convention ayant été résolue, d'autant que Monsieur R entend se prévaloir du pacte commissoire exprès.

En l'espèce, il est vrai que le contrat de vente prévoit que les arrérages et toutes autres sommes versées par la partie acquéreuse à la partie venderesse resteront acquis de plein droit à cette dernière à titre de dommages et intérêts forfaitaires. Cela étant, Monsieur R ne peut plus réclamer aux époux le paiement des rentes pour les années 2012 et 2013 puisque le contrat a été résolu le 9 mars 2011 et que plus aucune rente n'était donc due après cette date.

 

Bon à savoir   

Par dérogation à l'article 1184 du Code civil, l'article 1978 Code civil refuse au crédirentier la possibilité de demander la résolution du contrat en cas de non-paiement des arrérage. Toutefois, cette disposition porte sur la condition résolutoire tacite. 3

Ainsi, rien ne s'oppose à ce que les parties au contrat prévoient expressément la résolution de plein droit du contrat en cas de non-paiement des arrérages. Il s'agit du pacte commissoire exprès. 4

Lorsque la clause résolutoire expresse a été rédigée avec soin elle permet au créancier de disposer d'une sanction redoutable : cette clause l'habilite à résoudre le contrat de son propre chef et ainsi à faire l'économie d'une action en résolution judiciaire. 5

En cas d'absence de paiement par le débirentier de la rente au terme convenu, le crédirentier peut donc déclarer le contrat résolu de plein droit en s'appuyant sur le pacte commissoire exprès inséré dans le contrat de vente. Dans cette hypothèse, le juge se trouve sans pouvoir pour faire revivre la convention résolue, même lorsque la rente impayée a finalement été régularisée.

Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.

______________

1. Cour d'appel Mons (7e chambre), 25/06/2013, J.L.M.B., 2015/7, pp. 314-317.

2. En effet, lors de la mise en demeure intervenue le 9 février 2011, la rente du mois de décembre 2010, payable en principe le 5 décembre 2010, n'avait donc pas été payée depuis plus de trente jours.

3. S. Watillon, « La vente moyennant rente viagère », in Guide de droit immobilier, décembre 2000, VI.1.6.-1 - VI.1.6.4.-2, pp. 9 et suivantes.

4. P. Wéry, « Section 4 - Le créancier entend résoudre le contrat : le pacte commissoire exprès », in Droit des obligations - Volume 1, Bruxelles, Éditions Larcier, 2011, pp. 727-734 ; P. Van Renterghem, « Les clauses résolutoires expresses », A.D.L., 2011/4, pp. 405-448.

5. M. Fontaine, « La mise en œuvre de la résolution des contrats synallagmatiques pour inexécution fautive », note sous Mons, 21 juin 1983, R.C.J.B., 1991, pp. 40 et s.