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DROIT IMMOBILIER

VENTES IMMOBILIERES

25 Octobre 2016

Cour d'appel de Mons - Erreur dans la publicité immobilière

Cour d'appel de Mons - Erreur dans la publicité immobilière

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Présentation des faits1

Le 19 octobre 2009, Monsieur et Madame L. ont donné à la SPRL M. le mandat de vendre leur bien pour le prix annoncé de 435.000 euros, le prix souhaité étant de 410.000 euros. Le contrat a été conclu pour une durée de six mois expirant le 19 avril 2010.

Le 9 novembre 2009, Monsieur et Madame C. se sont portés acquéreurs de cette maison sur la base d’une publicité du 4 novembre 2009. Le prix de la maison était fixé à 138.000 euros dans cette publicité. Toutefois, le descriptif du bien mentionnait les éléments suivants : « splendide villa avec ateliers, idéal pour artisan. Finitions soignés, matériaux de qualité, etc. et revenu cadastral de 1.835 euros ».

La SPRL M. a ensuite communiqué le véritable prix de la maison, le prix de 138.000 euros dans la revue précitée était en effet dû à une « coquille ».

Monsieur C. est par ailleurs un professionnel du droit.

Le 12 janvier 2010, Monsieur C. a avisé la SPRL M. que « la vente a donc maintenant date certaine et est ainsi opposable aux acquéreurs subséquents. Vous avez donc le devoir d'aviser les amateurs du risque qu'ils prennent en achetant un bien qui a déjà été vendu et dont la vente a été actée dans un acte enregistré ».

La SPRL M. a refusé de produire le mandat exclusif de vente, dès lors qu’elle considérait que la demande de passation de l’acte de vente au prix de 138.000 euros ne correspondait pas au mandat et constituait en outre une demande abusive.

Le 15 mars 2010, les vendeurs ont signalé à la SPRL M. qu’elle ne souhaitait pas renouveler la convention exclusive de vente à sa prochaine échéance, le 19 avril 2010.

Le 18 octobre 2010, la SPRL M. a été informée par les vendeurs qu’ils avaient décidé de remettre leur immeuble en vente le 13 juillet 2010 auprès d’une autre agence immobilière.

Le 9 juin 2011, le vendeur a informé la SPRL M. que la maison avait été vendue le 31 mars 2011 pour le prix de 425.000 euros.

Monsieur C. a demandé que la SPRL M. communique sous astreinte le mandat de vente dont elle se prévaut ainsi que l’identité des vendeurs de la maison en question.

Monsieur C. a ensuite introduit une procédure pour que la vente soit conclue à son égard.

Dans son jugement rendu le 9 mai 2011, le Tribunal de première instance de Mons a débouté Monsieur C. de sa demande.

Monsieur C. a alors interjeté appel contre cette décision.

Décision de la Cour d’appel de Mons

La Cour d’appel commence par définir la faute, à savoir la violation d’une norme de bon comportement que l’on peut attendre d’une personne normalement soigneuse et prudente placée dans les mêmes conditions et exerçant les mêmes fonctions ou ayant la même qualification que la personne dont la responsabilité est recherchée. Pour cette définition, la Cour d’appel s’est référée à l’arrêt du 5 juin 2003 de la Cour de cassation.

La Cour d’appel analyse ensuite le comportement de Monsieur C. depuis le début du litige et estime qu’il ne s’agit pas du comportement d’un homme normalement prudent. La Cour prend également en considération la profession exercée par Monsieur C., laquelle implique un devoir de retenue et de loyauté dans la défense de ses intérêts.

La Cour considère ensuite que le comportement de Monsieur C. n’est pas crédible et qu’il n’a pas pu légitimement croire que la maison était vendue pour le prix de 138.000 euros, dans la mesure où les descriptifs auraient dû lui faire prendre conscience du fait qu’il s’agissait d’une coquille. Il aurait dès lors dû lire les pages inférieures de la revue, lesquelles lui auraient donné des informations sur le prix réel du bien.

De plus, la Cour constate que Monsieur C. n’a effectué aucune visite avant de faire son offre, et que la précipitation pour faire celle-ci ne peut s’expliquer que par le fait qu’il a voulu profiter de cette erreur au détriment des vendeurs.

Lorsque Monsieur C. a contacté la SPRL M., la Cour observe également que celle-ci lui a communiqué le vrai prix des vendeurs.

La Cour estime par ailleurs que Monsieur C. a adopté une attitude déloyale en entretenant la confusion concernant les conséquences sur la vente de l’enregistrement de la citation le 7 janvier 2010.

La Cour d’appel rappelle que Monsieur C., en sa qualité de praticien du droit, n’ignorait pas que l’agent immobilier est tenu à un devoir de discrétion, et que celui-ci implique qu’il ne « peut communiquer des données, faits et opinions relatifs à une mission à des personnes autres que celles qui sont autorisées à en prendre connaissance, et ce aussi bien durant qu’après sa mission ». Cette règle lui est imposée par l’article 34 de l’annexe 1 à l’arrêté royal du 27 septembre 2006.

Par conséquent, la Cour d’appel décide qu’aucune faute ne peut être reprochée à la SPRL M.

Concernant le dommage de la SPRL M., la Cour estime qu’il ne peut s’agir du montant de la commission à laquelle elle aurait pu prétendre puisqu’il est possible que la SPRL M. n’aurait pas trouvé un acquéreur à un prix agréant les vendeurs. C’est pourquoi le dommage de la SPRL M. constitue plutôt dans la perte d’une chance d’obtenir la commission.

La perte de chance est en l’espèce certaine. En effet, sans le litige créé par Monsieur C., la SPRL M. aurait pu poursuivre sa mission dans des conditions normales, dès lors que les vendeurs n’avaient a priori aucune raison de changer d’agence immobilière.

La Cour conclut que Monsieur C. est tenu d’indemniser la SPRL M. du dommage subi suite à la perte de chance de réaliser son mandat. La Cour, prenant en considération différents éléments, tels que la durée de la mission, les possibilités de renouvellement de celle-ci et les caractéristiques de l’immeuble en cause, fixe le montant du dommage en équité à la somme définitive de 10.000 euros.

Bon à savoir

La loi du 11 février 2013 organisant la profession d’agent immobilier2 définit l’agent immobilier intermédiaire de la façon suivante : il s’agit de « celui qui pour le compte de tiers, prête une assistance déterminante en vue de réaliser un contrat de vente, d’achat, de location ou de cession de biens immobiliers, droits immobiliers ou fonds de commerce »3.

Concernant la commission, il est prévu dans l’arrêté royal du 12 janvier 2007 que le contrat de courtage écrit doit nécessairement prévoir une clause prévoyant le tarif que le consommateur va payer. Le montant des honoraires est par ailleurs déterminé par l’agent immobilier en fonction de la complexité de la mission et des frais que son activité engendre4.

Dans l’hypothèse où le propriétaire ne respecte pas la clause d’exclusivité ou réclame la résiliation du contrat de courtage5, il devra payer une indemnité compensant la perte d’une chance pour l’agent immobilier de percevoir les commissions6. Toutefois si la perte de chance intervient en raison du comportement déloyal d’un candidat-acquéreur, c’est ce dernier qui sera redevable de l’indemnité7.

 

Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.

_______________ 

1. Mons, 15 mai 2013, J.L.M.B., 2014, p. 404.

2. M.B., 22 août 2013.

3. G. Carnoy, A. Delvaux, J.-L., Fagnart, C. Mélotte, C. Mostin et R. Simar, sous la coordination de Y. Ninane, Responsabilités des intervenants de l’immobilier, Limal, Anthemis, 2015, p.95.

4. J. Vansteene, « Agent immobilier. Quels tarifs? », Immobilier 2004, liv. 10, 3-4.

5. F. NAVEZ, « La vente d'un bien par son propriétaire en violation de l'exclusivité accordée à l'agent immobilier », J.L.M.B., 1997/28, p. 1128.

6. Comm. Bruxelles, 5 juillet 1990, Rev. Not. Belge, 1991, p. 462 ; Bruxelles, 28 janvier 1998, J.L.M.B., 1998, p. 1269 ; Cass., 5 juin 2008, J.T., 2009, p. 29.

7. Mons, 15 mai 2013, J.L.M.B., 2014, p. 404.